Les entreprises verront leur taux de contribution d’assurance chômage augmenter ou diminuer en fonction de leur nombre de contrats courts rompus dans l’année. 73 % des français sont favorables à cette mesure1 tandis que les entreprises des secteurs d’activités concernés redoutent des conséquences sur le marché de l'emploi.
La Covid-19 a incontestablement fragilisé les entreprises qui ont dû subitement suspendre un bon nombre de CDD et de CTT afin de réduire leurs pertes. Il était donc plutôt malvenu de leur imposer un malus sur les contrats rompus dans de telles conditions. Même crainte du côté de l'intérim qui se présente, indéniablement comme l'un des premiers domaines indirectement impacté par la réforme. Qui plus est, les agences de travail temporaire proposent en moyenne des contrats d’une durée de 1,96 semaines2 (en 2019).
Devant de telles difficultés et de controverses, un recours devant le Conseil d’État a annulé les dispositions relatives à cette réforme. La ministre du travail s’est engagée à adapter les conditions de sa mise en œuvre, initialement prévue pour le 1er mars 2021.
Quelles sont les règles du bonus-malus et comment se calcule-t-il ? Où en est la réforme ? Quels sont les impacts pour le travail temporaire ? Tout ce que vous devez savoir sur le bonus-malus.
Objectifs du bonus-malus pour le travail temporaire
Entre 2000 et 2017, le recours aux contrats de moins d’un mois a plus que doublé dans l’ensemble des secteurs d’activités3. Sept embauches sur dix sont des CDD de moins d’un mois et près d’un tiers ne dépassent pas une journée. Depuis plusieurs années, de nombreuses mesures tentent donc de renforcer les contrats stables tels que l’incitation à embaucher en CDI Intérimaire, qui représentent 7,60 % des emplois en intérim4. Afin d’intensifier les mesures dans cette direction, le gouvernement a proposé l’application d’un bonus-malus, mis en place par l’URSSAF ou la MSA. Quels sont les objectifs de ce dispositif ?
Réduire le nombre d’inscrits à Pôle Emploi
Clairement, plus le nombre de salariés qui s’inscrivent à Pôle Emploi est élevé, plus les entreprises paient des cotisations. Si une fin de mission est suivie, dans les 3 mois, par une inscription à Pôle Emploi, le salarié est comptabilisé dans le calcul du taux de contribution.
Moduler les contrats de travail précaires
Cette réforme vise à inciter les entreprises à pérenniser l’activité de leurs salariés. Elisabeth Borne, Ministre du travail, l’a confirmé. Son intention, « est de lutter contre la précarité, notamment du fait d’un recours excessif aux contrats courts»5.
Transformer les successions de missions courtes en des missions longues ou en CDI
Des études ont démontré que certains secteurs d’activités (cf ci-dessous) proposent davantage de contrats courts. Avec ce dispositif, le gouvernement vise certains secteurs dont ils estiment qu’ils devraient ne pas user et abuser de la flexibilité offerte par les CDD et les CTT de courte durée.
Les secteurs concernés par le bonus-malus
Seules les entreprises de plus de 11 salariés en 2018, 2019 et 2020 sont concernées par cette réforme. Le mercredi 04 décembre 2019, le journal officiel avait publié la liste des 7 secteurs d’activité visés6 :
L'agro-alimentaire (denrées alimentaires, boissons, tabac)
Les « activités spécialisées, scientifiques et techniques » telles que la publicité
L’hébergement-restauration
L'assainissement des eaux et la gestion des déchets
Le transport et l'entreposage
La fabrication de caoutchouc et plastique
Le travail du bois, l'industrie du papier et l'imprimerie
Ces sept domaines n’ont pas été sélectionnés au hasard. Leur taux de séparation dépasse les 150 %. En d’autres termes, ces entreprises emploient en moyenne 2 personnes en contrat stable contre 3 personnes en contrat précaire7.
Trois secteurs d’activités ont été épargnés par la mesure : Le bâtiment, les travaux publics et la santé. Cependant les syndicats des secteurs d’activités sélectionnés sont actuellement en discussion avec la Ministre du travail afin de renégocier les conditions et la viabilité de ce choix.
Comment le calculer ?
Prise en compte des périodes de références
Les périodes de références prises en compte pour le calcul du taux de contribution à l’assurance chômage sont progressives d’années en années.
Pour le taux de 2021, la période de référence est, normalement, l’année 2020.
Pour le taux de 2022, la période concernée représente les années 2020 et 2021.
En 2023, ce taux sera calculé sur la période de référence des 3 années précédentes.
Le calcul du taux de contribution à l’assurance chômage
Initialement, le taux de contribution à l’assurance chômage était de l’ordre de 4,05 %, un taux uniforme applicable à l’ensemble des secteurs d’activités. Dans l’application de la mesure, ce taux se module en fonction de deux critères : Le niveau de recours aux contrats courts (le taux de séparation) comparé au taux de la moyenne du secteur d’activité. Ce taux varie ainsi entre 3 % (bonus) et 5,05 % (malus). Il s’applique sur l’ensemble de la masse salariale de l’entreprise.
Le calcul du taux de séparation
Ce taux de séparation correspond au niveau de recours aux contrats courts. Il se calcul en fonction du nombre de fins de contrats de travail ou de missions d’intérim rapporté à l’effectif annuel moyen.
Les conditions du calcul du taux
Certaines fins de missions ne sont pas prises en compte dans le calcul : Les démissions, les fins de contrats d’apprentissage et de professionnalisation, les fins de contrats d’insertion (IAE et CUI) et les fins de missions concernant des travailleurs bénéficiant de l’OETH ou les travailleurs intérimaires employés par une entreprise adaptée de travail temporaire (EATT).
L'analyse du taux
Si le taux de séparation est en dessous de la moyenne du secteur d’activité, l’entreprise se voit bénéficier d’un bonus, soit d’une réduction des cotisations chômage.
Si ce taux est au-dessus, l’entreprise voit ses cotisations d’assurance chômage augmenter par le biais d’un malus.
Les taux de séparation supérieurs à 150 % du taux du marché sont ainsi susceptibles de se voir attribuer un malus.
Les échéances de son entrée en vigueur repoussées
La première modulation de ces contributions était censée s’appliquer à compter du 1er mars 2021. Elle était calculée en fonction des fins de contrats et de missions d’intérim constatées entre le 1er janvier et le 31 décembre 2020. Cependant, sa mise en application est décalée et ne rentrera pas en vigueur à la date convenue.
Cette réforme, qui bénéficie aux salariés et aux demandeurs d’emploi, peine à être populaire auprès des entreprises et des agences d’intérim. En France, la rigidité du marché du travail a tendance à freiner certaines embauches. Les entreprises, et en particulier les PME, ne sont pas favorables à l’idée d’être pénalisées. De plus, ils redoutent que ce type de conditions ouvre des opportunités au travail détaché et aux plateformes indépendantes.
Pourtant, partant du principe qu’un salarié à temps plein et qu’un salarié à mi-temps n’ont pas la même allocation chômage, cette réforme vise plutôt à établir plus d’équité même si le Conseil d’État a établi que celle-ci était une atteinte au « principe d’égalité ». Elisabeth Borne a déclaré à ce sujet :« Nous aurons procédé à cette adaptation avant le 31 mars 2021, date d’effet de la décision du conseil d’Etat : il n’y aura d’interruption de droits à assurance chômage pour aucun allocataire8 ».
Ainsi la réforme est provisoirement mise en suspens et censurée par le Conseil d’État9. Les ministres, chargés de cette mesure, ont été contraints de la reporter et inévitablement de l’adapter à la situation sanitaire actuelle. Cependant, cette mesure sera adaptée et non supprimée. Les entreprises éligibles, en attendant, peuvent prendre le temps de se préparer au mieux à sa mise en application prochaine.
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